Il était là, juste devant. Un joli petit guerrier, inconscient du danger qui le menaçait. Car juste au dessus de lui, tapi dans un arbre, des yeux rouge brillaient. Il ne se vit même pas mourir, une défense plantée dans le cœur. L’arbre frémit un instant, puis Vervada en descendit, planant à l’aide de ses ailes.
« Un de moins... »
Il jeta un œil à la liste qu’il tenait entre les mains. Une liste de noms. Il pouvait désormais en rayer un autre.
« Ils ne nuiront plus à Rushu... »
Un nuage de fumée s’éleva autour de Vervada et il disparut. Personne n’avait été témoin du carnage silencieux qui venait de se dérouler.

Le disciple d’Osamodas réapparut au milieu d’un grand vacarme, au zaap d’Amakna. Il soupira puis se dirigea vers son temple de classe. C’était l’endroit que son client avait choisi. Depuis un mois, il lui remettait régulièrement des listes de noms de guerriers de la cité de lumière et Vervada les tuait, ce pour quoi il recevait une certaine somme d’argent. En arrivant devant le temple, il rabattit sa capuche sur son visage. Personne ne devait le reconnaître. Les mercenaires dans son genre étaient poursuivis en Amakna. Il se rendit dans la partie du temple réservée à ses disciples. C’est là qu’il l’attendait, lui aussi le visage masqué. Seule sa queue fourchue témoignait de son appartenance à la race des invocateurs.
« -C’est bon, ils sont tous morts.
-Très bien, voilà pour toi. »
Il lui tendit une bourse de kamas. Soudain, Vervada eu une idée. Une idée qui pourrait bien le faire devenir riche. Il sortit une dague de sous sa cape et la plaqua sur la gorge de son interlocuteur, lui enlevant sa capuche. Il ricana doucement.
« -Je connais ton visage maintenant. Je pourrais immédiatement aller de dénoncer à la milice. Mais peut-être que j’oublierais si j’obtiens une certaine somme d’argent »
L’homme était terrifié.
« -Co... Combien ?
-Un million devrait suffire.
-Mais je n’ai pas cette somme !
-Oh, quel dommage... Dire que j’allais renoncer à t’envoyer en prison pour l’éternité...
-D... D’accord, tenez. »
D’une main tremblante, il lui donna une bourse remplie de kamas.
« Merci beaucoup. »
Et sans une seule hésitation, Vervada lui trancha la gorge. Puis il disparut...

« Où suis-je ? Qui suis-je ? »
Je me souviens de ces mots comme étant mes premières pensées en venant à la vie. J’étais allongé là, sur la roche, n’osant pas ouvrir les yeux. Puis une voix retentit, m’arrachant à mes songes.
« Bienvenue à toi, jeune disciple d’Osamodas. Tu es ici dans le monde des Douze, et à partir de maintenant, tu va devoir survivre. »
Je me redressais donc et ouvrit les yeux. Ce qui m’apparut alors me semblait merveilleux. Des pierres, des rochers immenses, flottaient devant moi. Et plus que tout, ce qui me frappa était la vue. J’étais apparemment en très haut altitude et tous les muscles de mon corps me criaient de me jeter dans le vide, ce que je ne fis finalement pas, mon instinct de survie me retenant. Aujourd’hui encore je le regrette...

Je commença donc ma vie d’aventurier, sur une véritable île rocheuse, considérablement plus grande que l’endroit où j’avais vu le jour. Je ne restait pas longtemps à cet endroit, j’avais tellement envie de découvrir le vaste monde qui s’étendait juste sous mes pieds. Je débarquais dans ce monde dans une ville fortifiée du nom d’Astrub, et je commençais mon exploration en devenant pécheur, métier que je n’ai d’ailleurs pas exercé longtemps. J’ai parcouru la grande forêt au Nord de cette ville, les champs, les plaines et les quelques montagnes. J’ai accompli des quêtes, j’ai combattu des monstres et j’ai accumulé un grand nombre de ressources. Hélas au bout d’un moment je me suis lassé. Il m’en fallait plus, je voulais en voir plus. J’ai donc appris le métier de mineur et j’ai exploré les souterrains, endroit encore inconnu pour moi. Et puis un jour, j’ai eu une révélation. J’ai découvert une vieille carte du monde bien usée reposant dans un coffre au cours de l’une de mes explorations souterraines. Et j’ai pris conscience de tous ces territoires, de toutes ces contrées que je pouvais explorer et qui me réservaient sûrement bien des surprises. Il n’était alors plus question de rester une minute de plus à Astrub. Il y avait sur ma carte une ligne rouge, tracée avec de la poussière de minerai, qui ressemblait à un chemin. J’ai donc décidé de le suivre. J’ai entre-aperçu une plage, que, en y repensant, je n’ai aujourd’hui pas encore vraiment explorée. J’ai traversé un pont interminable, et je suis arrivé. Une île, recouverte d’une épaisse forêt, si bien qu’on ne pouvait pas savoir ce qu’il s’y cachait. Un garde m’as abordé pour me demander de payer une taxe. Je me suis donc résolu à dépenser les quelques kamas gagnés grâce à mon métier. Une fois que j'eus payé, il m’indiqua la direction de ce qui ressemblait le plus à une ville dur ce continent. Je m’y suis dirigé immédiatement en observant avec attention la forêt. J’y ai vu des animaux étranges, des plantes qui semblaient avoir une conscience, des arbres inconnus et j’ai été fasciné. J’ai été déçu en arrivant à la ville. C’était un banal entassement de constructions sans grand intérêt. Mais pas découragé pour autant, je me suis employé à faire le tour de l’île. J’ai découvert qu’il y avait quatre villages, mais un m’as particulièrement frappé : Feudala. Je me sentais chez moi à cet endroit. Je m’y suis installé, et c’est là que j’ai vécu pendant très longtemps, si bien que j’en connais aujourd’hui chaque recoin. Et puis un jour, il arriva quelque chose qui mit fin à cette période de bonheur...

C’était un jour comme les autres, et j’étais allongé au bord d’un lac en compagnie de mon fidèle tofu. Je me réchauffait grâc
e au rares rayons de soleil qui perçaient à travers le feuillage épais de la forêt. Je m’amusait à attraper les poissons qui passaient près de moi, puis je les relâchait. Je devais être là depuis près de deux heures quand j'aperçus au fond du lac un étrange reflet rouge. Au début je crus que c’était une gemme quelconque, puis je me rendit compte au bout d’un moment qu’une gemme serait restée inerte, or la « chose » donnait l’impression d’être vivante. Je me décidais donc de plonger pour voir ça de plus près. Je récupérait donc l’objet, qui était anormalement lourd, et le remontait. Mon tofu et moi l’avons examiné pendant un bon moment, puis je pris la décision de le frapper avec mon marteau. Je n’aurais jamais du... J’ai frappé de toutes mes forces, et au moment ou le marteau à touché l’objet, il s’est brisé en plusieurs morceaux. Un rugissement titanesque s’est élevé et la pierre a commencé à irradier d’une lumière insoutenable. Un dragon en est sorti. Un dragon à la fois magnifique et effrayant. Il avait des écailles de feu et des yeux rouge comme des rubis. Il a fondu sur mon tofu, et, dans un geste fou je l’ai protégé de mon corps. L’instant d’après, je ressentais une douleur indescriptible. J’avais l’impression que mon sang c’était changé en lave et que mon esprit était en train de bruler. Puis tout s’est arrêté. D’un coup. Plus de douleur, rien.